Il y a du Clare Lydon dans l’étagère en osier et du Cerise la Castagne exposé. Un grand mur couleur lilas entre la pièce principale et le petit salon cosy, l’odeur des citrons jaunes découpés par Hélène Carreira derrière le bar et un son de RnB pour finir d’enrober cette adresse pépite, nichée à deux pas du métro Mairie de Montreuil. Le Montvenus, clin d’œil au « mont de Vénus » du pubis, joue cartes sur table d’entrée avec une devanture où il est inscrit en lettres majuscules « Bar à cocktails – Queer – Féministe ».
Le promesse est allégrement tenue. On peut venir s’y poster les yeux fermés, histoire d’y siroter un cocktail signature fait maison (alcoolisé ou désalcoolisé) accompagné de tapas, de chiller en terrasse, ou de bouquiner un livre féministe entouré d’œuvres queers. La nuit tombée, l’endroit est idéal pour un before avant une soirée à La Marbrerie par exemple, la salle de spectacles étant située à un jet de pierre de là.
À lire aussi
Lieu queer en banlieue
Ce qui saute aux yeux tout de suite : c’est qu’on se sent chez elles. Les fondatrices Hélène Carreira et Andréa Bellemere-Laussat ont créé un lieu à leur image, qui transpire tout à la fois leurs parcours individuels, leurs trajectoires de vie, mais qui raconte aussi en sous-texte leur histoire d’amour, marquée par une déconstruction commune et un engagement grandissant.
Dans le milieu de la restauration depuis 18 ans et spécialisée dans la confection de cocktails depuis 9 années, Hélène, 37 ans, a grandi en Seine-Saint-Denis, entre Noisy-le-Sec et Montreuil. Ouvrir un lieu queer et féministe en banlieue a progressivement fait du chemin dans sa tête. Elle dépose un expresso et son sucre brun à côté de bougeoirs et d’un vase de fleurs séchées, puis ouvre la boîte à souvenirs.
« J’ai toujours assumé socialement mon homosexualité, mais quand j’avais la vingtaine, un lieu comme ça, ça n’existait qu’à Paris. De manière très pragmatique cela impliquait un gap financier. Mais je crois, aujourd’hui, que c’était aussi une façon de nous invisibiliser dans nos propres villes. »
À lire aussi
Fruit d’une histoire d’amour
Jusqu’à ses 19, 20 ans, Andréa n’avait, elle, que l’horizon « d’une petite ville » de Normandie pour s’explorer. Ses grands yeux clairs regardent dans le rétro. « Je ne savais pas qui j’étais parce que je n’avais aucune représentation à laquelle m’identifier. Dans ma famille, ça [son orientation sexuelle] n’était pas un sujet, on n’en parlait tout simplement pas. Jusqu’à mon arrivée à Paris, il y a 9 ans, je n’avais aucune expérience des lieux queers. »
Elle fera alors la rencontre d’Hélène en travaillant au Rosa Bonheur. « Je me suis découverte avec elle », juge-t-elle aujourd’hui. Hélène embraye : « On a fait du chemin ensemble, on a ouvert les yeux sur pas mal de choses ».
Une route qui a mené le couple à ouvrir le Montvenus en février 2024. Andréa plante le décor : « On voulait faire un bar en banlieue où on aurait voulu aller, avec notre DA [direction artistique] ».
À lire aussi
À leur image
Le rendu est intime, lumineux et accueillant. Loin des clichés longtemps projetés sur les membres de la communauté LGBTQIA+, argue Hélène.
« À mon époque, à Paris, les lieux queers étaient forcément assez sombres, cachés, parfois secrets. Cela collait à l’image que se faisait le grand public de la communauté, centrée exclusivement sur le sexe à outrance, les drogues et une forme de toxicité. En clair, des dépravés. C’était en majorité aussi des lieux dédiés à la communauté gay, pas lesbiens. Et comme ils étaient peu nombreux, c’était souvent bondé. »
Bref, rien à voir avec le Montvenus, ses grandes baies vitrées donnant sur le boulevard Paul-Vaillant-Couturier, sa terrasse et ses murs blancs. Hélène précise le fond de sa pensée : « C’est aussi un message politique qui dit : on est partout et pluriel. »
À lire aussi
Tricot, drag show et dessins de modèle vivant
Le propos (engagé) est disséminé avec doigté dans la décoration du spot, comme dans sa programmation. En toile de fond, les illustrations de l’artiste queer Cerise la Castagne, celles de Margot Koskas (Draw feminism sur Instagram) ou la carte du projet Queer City répondent aux dessins de nues, à la littérature féministe et à la charte des valeurs du lieu.
« Tous les mois, on fait un vernissage et on expose une artiste. Actuellement, c’est Cerise la Castagne, mais on le fait aussi avec des illustratrices émergentes », détaille Hélène. Avant de préciser : « On ne fait pas de bénéfice sur les ventes. C’est entre l’artiste et l’acheteuse. Nous on veut juste les mettre en valeur ».
En parallèle, le Montvenus accueille des intervenantes féministes, organise des ateliers de tricot ou de dessin de modèle vivant, des « drink & draw », des drag shows et permet de temps à autre de se faire couper les cheveux à prix libre. « Même si on nous a parfois reproché nos tarifs, on a conscience que les femmes et les personnes queers forment une communauté précarisée et on est attentives à ça aussi », ajoute Hélène.
Elle poursuit : « Certains ne s’y retrouveront peut-être pas, mais il faut des lieux pour les différents moments de vie, pour tous les publics. Notre clientèle est un peu plus âgée qu’à La Mutinerie par exemple, elle oscille entre 29 ans et la quarantaine, et elle est demandeuse de qualité, quitte à prendre un peu moins de verres, ou mettre un peu plus d’argent. »
À lire aussi
Des cocktails désalcoolisés qui valent le détour
Les prix sont d’ailleurs loin d’être prohibitifs pour ceux qui privilégient la qualité dans leur verre ou leur assiette. Le café (expresso à 2 euros) est, par exemple, torréfié à Montreuil, tandis que la bière (pinte entre 7,20 et 8 euros) est brassée sur la commune. La plupart des produits sont bios, sourcés et locaux. Logique, quand on sait que les fondatrices ont une vision intersectionnelle du féminisme.
@actu.paris Le bar à cocktails queer et féministe MontVenus, clin d’œil au « mont de Vénus » du pubis, a ouvert en 2024 à Montreuil. #LGBT #bar
Quant au choix des cocktails (entre 7,5 en happy hour et 12 euros), on retrouve les classiques (Spritz, Mojito, Pisco Sour, etc) et une série de breuvages signatures baptisés avec des noms de proches d’Hélène et Andréa. Comme « Fanny » et son rhum infusé à la madeleine ou « Bénédicte » qui mêle tequila, campari et triple sec. Quelques-uns peuvent également se goûter en version « sober » (sans alcool) et on préfère vous prévenir, cela vaut le détour.
Et pour ceux qui n’aurait pas compris, n’ayez crainte, le bar est ouvert à tous, tant qu’on est « respectueux, bienveillant et dans le partage ». Andréa taquine : « On est hétéro-friendly ».
Adresse
16 Boulevard Paul Vaillant Couturier, 93100 Montreuil
Suivez toute l’actualité de vos villes et médias favoris en vous inscrivant à Mon Actu.
L’objectif de club-montreuil.com est de parler de Montreuil dans la transparence en vous procurant la visibilité de tout ce qui est en lien avec ce sujet sur la toile L’équipe club-montreuil.com vous propose ce papier qui traite de « Entreprendre à Montreuil » mais aussi des actualités de notre ville afin de comprendre comment vit notre territoire. Ce post a été reconstitué du mieux possible. Vous avez l’opportunité d’utiliser les coordonnées indiquées sur le site pour apporter des explications sur cet article traitant du thème « Entreprendre à Montreuil ». Il y a de prévu de multiples développements sur le sujet « Entreprendre à Montreuil » d’ici peu, on vous incite à visiter notre site web périodiquement.